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18/01/2012

MANARA & FELLINI : Voyage à Tulum

 

Milo MANARA & Federico FELLINI : « Voyage à Tulum »

 

Voyage à Tulum est une adaptation en bande dessinée d’un projet de Federico Fellini non abouti au cinéma mais qu’il avait publié en feuilleton en 1986 dans le journal italien Il Corriere della Sera avec, déjà, des illustrations de Milo Manara.

Le film aurait dû raconter le voyage entrepris par Fellini au Mexique à la rencontre des sorciers yaquis, de tradition toltèque, avec l’anthropologue Carlos Castaneda comme guide, mais rien ne se passe comme prévu. Castaneda ne se présente pas au rendez-vous fixé par le producteur. Fellini y rencontre entre autres Alejandro Jodorowsky et Jean Giraud alias Moebius. C’est cette aventure très mystérieuse, à la frontière du paranormal, que narre avec humour la bande dessinée de Manara. Fellini y est remplacé par Snaporaz, son alter ego à l’effigie de Marcello Mastroianni. À ce récit, le cinéaste ajoute une sorte de prologue à Cinecittà avec des personnages complètement étrangers à l’histoire initiale et qui font quand même le voyage avec lui. L'ouvrage comporte également deux récits complets de Manara évoquant l'univers de Fellini, des dessins ainsi que des propos des deux auteurs.

 

Casterman – Edition originale de 1990.

123 pages – 30,5 x 23 cms – 955 grammes.

Quelques ( inévitables mais infimes ) marques de frottements sur l’arrière de la jaquette de protection et un tout petit choc en bas de tranche… mais l’ensemble est quasi-parfait et en très très bon état, nickel : 15 €uros. / Vendu ! - Temporairement indisponible.

 

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Fellini a voulu voir Tulum

 

Dans les années 1980, le cinéaste italien avait fait un voyage au Mexique dans l’idée de tourner un film inspiré des écrits de Carlos Castaneda. Le film n’a jamais vu le jour. Les raisons ? Aussi ésotériques que les livres de l’anthropologue péruvien.

 

Octobre 1984. Federico Fellini reçoit un coup de téléphone alors qu’il se trouve sur un plateau de Cinecittà, en pleine préparation de son film Ginger et Fred.

— Carlos est ici. Tu veux le voir ?

 

Cela fait quinze ans que Fellini cherche à rencontrer Carlos Castaneda. L’auteur de L’Herbe du diable et la petite fumée (1968), Voir (1971) et Voyage à Ixtlan (1972), des livres publiés dans le monde entier, qui suscitent curiosité et admiration. Il révèle dans ces ouvrages une part de la sagesse d’un supposé Indien Yaqui se présentant sous le nom de don Juan Matus, qu’il aurait connu dans le désert de Sonora, lors d’une enquête menée dans le cadre de ses études d’anthropologie à l’université de Californie. Ce sorcier, comme l’affirme Castaneda dans son récit à la première personne, l’aurait pris comme apprenti et lui aurait révélé les préceptes ancestraux de son peuple, les effets psychotropes du peyotl et les puissances surnaturelles que les hommes pouvaient parvenir à dominer. Fellini a le projet de réaliser un film inspiré des livres de Castaneda, mais il n’a pas trouvé le moyen d’en acquérir les droits.

Quelques années plus tard, en 1988, dans le défunt hebdomadaire L’Europeo, il racontera cette rencontre nocturne avec Castaneda dans un hôtel de Rome : « A l’heure dite, j’ai vu arriver un homme petit, trapu, brun : un Sicilien, un gros Sicilien avec des dents blanches brillantes, aux manières affables, cordiales. Quelqu’un de très jovial : aucun trait romantique qui puisse évoquer un quelconque envoûtement. Le sourire du Mexicain [ en fait Castaneda était péruvien ], qui fait penser aux Calabrais, aux Napolitains, les cheveux ondulés et brillants, les sourcils très noirs, l’œil un peu globuleux, mais affable, curieux. Un regard touchant, un côté convivial et tactile, une manière de s’assurer que vous êtes là et que les autres sont ici avec vous. « My dear friend. » Cher ami ! Nous nous sommes donné l’accolade. »

 

D’autres metteurs en scène, comme Alejandro Jodorowsky, avaient tenté en vain de réaliser un film inspiré de l’oeuvre de Castaneda. Apparemment, l’écrivain avait choisi Fellini, et vice-versa. A Rome, ils se voient plusieurs fois. Castaneda, tel un oracle, insistait sur le fait que le moment était propice pour faire le film. Il voulait convaincre Fellini de tourner au Mexique, alors que ce dernier disait qu’il pouvait réaliser des décors de paysages mexicains à Cinecittà. Ce sera leur premier désaccord. Le cinéaste le présente à son producteur, Alberto Grimaldi. Fellini veut remettre à plus tard la rencontre, parce qu’il est sur le point de commencer le tournage de Ginger et Fred, mais Castaneda l’en empêche : il lui dit que le rendez-vous suivant doit avoir lieu immédiatement à Los Angeles.

Le voyage est financé par Grimaldi, en 1984, mais Fellini ne tournera jamais le film. De retour à Rome, le cinéaste raconte à ses amis que Castaneda s’est volatilisé, mais que lui et ceux qui l’accompagnaient viennent de vivre un voyage étrange, ponctué de messages anonymes [ trouvés dans les chambres d’hôtels ], de coups de fil menaçants, de signaux ésotériques. La légende noire de ce film non tourné se cristallise en 1986, quand le Corriere della Sera publie, sous le titre Viaggio a Tulun (sic), un scénario que le cinéaste a écrit en collaboration avec son scénographe Tullio Pinelli, accompagné d’illustrations de Milo Manara. Le quotidien présente le texte comme un scoop sur ce que va être le prochain film de Fellini. Le scénario raconté est inquiétant, mais le message sur lequel il se termine l’est plus encore : « Les faits ici présentés se sont produits dans la réalité. »

 

(…)

 

Dans les dernières années de sa vie, Fellini n’est pas parvenu à réunir les fonds pour faire le film et il a transformé en bande dessinée, avec des dessins de Milo Manara, le scénario qu’il n’avait pas pu porter à l’écran. Viaggio a Tulum est paru en 1990 chez Rizzoli [ et en France chez Casterman, sous le titre Voyage à Tulum ], Manara en a fait une histoire érotique, où Fellini, qui apparaît dans certaines planches, est figuré parfois sous les traits de Marcello Mastroianni. La réalisation de la bande dessinée a été menée tambour battant : Fellini donnait les ébauches à Vincenzo Mollica [ ami de Fellini, spécialiste de la BD et critique de cinéma, qui a fait se rencontrer Manara et le cinéaste ] et celui-ci les envoyait par fax à Manara, qui se trouvait à Vérone. Mais le sortilège mexicain continuait d’opérer. Ils se sont mis à recevoir d’étranges appels téléphoniques. « Ils voulaient savoir ce que nous faisions. C’était un groupe italien lié aux expériences de Castaneda, c’est-à-dire à son mode de pensée. »

Si, dans un premier temps, Fellini a prévu que le personnage de Carlos Castaneda figurerait dans la bande dessinée, ces appels anonymes l’amènent à y renoncer. Il modifie le début de l’histoire en la rendant bien plus surréaliste, ce qui n’est pas pour déplaire à Manara : plus qu’un rêve, la BD serait un grand cauchemar allégorique sur l’apocalypse du monde telle qu’ils étaient en train de la vivre.

Fellini a toujours pensé que son projet cinématographique sur les livres de Castaneda avait sans doute irrité et inquiété certaines personnes, qui devaient appartenir à une sorte de secte dont dépendait certainement l’anthropologue. En somme, d’après lui, les menaces provenaient d’une organisation dépassant la personne du mystérieux écrivain. Et comme le cinéaste était très superstitieux, il a préféré ne pas porter cette histoire à l’écran.

 

(…)

 

Fellini avait beaucoup de points communs avec Castaneda. L’un comme l’autre étaient capables de changer le regard des autres. Egocentriques, ils faisaient tous deux l’objet d’un culte et n’avaient pas leur pareil pour raconter des histoires auxquelles ils finissaient par croire eux-mêmes. Et c’est avec un art consommé qu’ils inventaient leur propre personnage et construisaient une sorte de mythologie d’eux-mêmes.

Fellini ne s’est peut-être jamais rendu compte que, à l’égal de Mastroianni dans la BD de Milo Manara, il avait été lui-même sans le savoir le personnage d’un film. Un film dont Castaneda tirait les ficelles. Mais on peut aussi imaginer qu’en grand visionnaire qu’il était, le cinéaste ait compris dès le début la manipulation de Castaneda et s’en soit servi pour que nous soyons tous les acteurs éternels du film qu’il n’a jamais tourné.

 

http://www.courrierinternational.com/article/2011/05/19/fellini-a-voulu-voir-tulum 

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